La matrice SWOT est un puissant outil pour évaluer son positionnement stratégique. Bien conduite, cette analyse permet en effet d’évaluer ses forces et ses faiblesses, de lister les menaces et de détecter les opportunités. Nous nous attarderons sur l’indispensable nécessité d’adopter une démarche coopérative pour la conduire à son terme. Nous poursuivrons en seconde partie avec la méthode en 5 temps pour réaliser et réussir une étude SWOT express et pertinente.
Définition
L’analyse SWOT propose de synthétiser en un seul visuel la situation concurrentielle actuelle. Bien utilisée, elle permet de circonscrire le champ des possibles tout en esquissant les voies de développement. Cet outil d’analyse stratégique, ainsi dénommé par son acronyme anglo-saxon SWOT : Strengths
Forces
, Weaknesses
Faiblesses
, Opportunities
Opportunités
, Threats
Menaces
, semble d’un usage assez simple, à la portée de tout un chacun.
Il s’agit en effet d’un tableau à quatre cases, où l’on range après identification, les forces et les faiblesses de l’entreprise, les menaces pesant sur elle à court ou moyen terme tout comme les opportunités potentielles. Cet outil est rapidement devenu un incontournable de la démarche stratégique.
Simple dans son principe, efficace lorsqu’elle est bien exploitée, elle mérite en effet d’être utilisée le plus largement possible. Mais attention, la simplicité n’est qu’une apparence. Pour être utilisé à pleine puissance la matrice SWOT exige une étude soignée de chacun des cadrans et une coopération à tous les niveaux de l’entreprise.
Le principe
Légende : La matrice SWOT, un incontournable de l’analyse stratégique, les ressources
I) Forces et Faiblesses
Les forces
- Quelles sont les forces à notre disposition ?
- Sont-elles réelles ?
- Sont-elles correctement exploitées ?
- Correspondent-elles à des attentes du marché ?
- Qu’en est-il des principaux concurrents ?
Les faiblesses
L’analyse des faiblesses n’est pas une nouvelle version du cahier de doléances. Cette analyse gagne en pertinence lorsqu’elle est réalisée en confrontation avec la connaissance dont on dispose des atouts des principaux compétiteurs.
2) Menaces et Opportunités
Les menaces
C’est le point centrale de l’étude, le pôle qui permet de recentrer les deux chapitres précédents dans la réalité du terrain. Surtout pas d’impasse ! Les menaces seront identifiées à l’aide d’une
bien conduite : détection, gravité, probabilité, prévention, thérapeutique. La case menace de la matrice est quelque part l’assurance que la démarche se développe dans le réel et pas dans un imaginaire abstrait.
Les opportunités
Évidemment cette dernière case porteuse de promesses mérite d’être valorisée comme il se doit. Ce n’est pas la plus simple à remplir. Les opportunités ne sont pas systématiquement écrites en noir sur blanc. Faut-il encore détecter les signaux faibles, les interpréter, les compléter et les rapprocher afin de trouver la source de l’innovation. Là encore, seul un bon travail coopératif permet de mener à bien cette étape fondamentale.
Comment utiliser la matrice SWOT ?
Cet instrument n’est pas réservé aux seules multinationales. Loin s’en faut.
Toute entreprise, même une "TPE", toute organisation, même une association, l’utilisera à profit. L’étude de type SWOT, c’est l’occasion de faire une pause pour :
Observer comment on fonctionne à l’intérieur pour mieux exister dans le monde extérieur."
Une entreprise commerciale résumera son analyse stratégique par la formule plus lapidaire:
"Comment améliorer durablement nos profits".
Dans tous les cas, l’idée est de rechercher une amélioration durable. L’analyse SWOT est particulièrement délicate.
La simplicité de l’outil nest qu’une apparence. Une étude trop rapidement menée en comité restreint et à huis clos risque de masquer sensiblement la réalité. Les décideurs sont alors fortement incités à opter sans avoir pris le soin suffisant de développer et d’évaluer les alternatives. (Source : Extrait, les nouveaux tableaux de bord des managers)
Se regarder objectivement et sans concession n’est pas à la portée du premier venu. Seule une démarche coopérative impliquant le maximum d’acteurs de l’entreprise et en exploitant les outils de créativité comme le brainstorming et les cartes heuristiques permettra de profiter pleinement de cette phase d’étude "introspective".
D’autre part, il est toujours profitable de faire participer à l’élaboration de l’analyse stratégique un maximum de collaborateur et parfois même de partenaires externes comme le recommande la théorie des parties prenantes. Non seulement on bénéficie d’une exhaustivité d’informations, d’autres part les collaborateurs seront bien plus motivés pour suivre et réaliser les objectifs stratégiques, fruit de la démarche.
C’est aussi l’unique moyen pour bien marquer la frontière entre réalité, auto-estime immodérée et dénigrement systématique.
Profitons des réseaux sociaux
Avec des réseaux sociaux correctement déployés dans l’entreprise, la participation générale des collaborateurs est tout à fait réalisable. C’est ainsi que pratique
dirigeant de HCL Technologies, et auteur du best seller :
"Les Employés d’abord, les clients ensuite" Diateino, 2018.
Analyse stratégique, les conseils
Cette analyse sera effectuée relativement au(x) principal(aux) compétiteur(s).
La première ligne Forces-Faiblesses répond peu ou prou à la question :
En quoi sommes-nous plus forts ou plus faibles que nos concurrents ?
Autrement dit :
- Comment se démarquer de la concurrence ?
- Qu’apprécient en nous les clients ?
- Que doit-on améliorer ?
La seconde ligne Menaces-Opportunités répond à la question :
Que faut-il faire pour être meilleur que nos concurrents ?
Autrement dit :
- Quelles sont les occasions offertes ?
- Que devons-nous craindre (nouveaux entrants, innovation, législation, réglementation…) ?
D’expérience, la phase d’analyse des forces est souvent négligée. Au contraire, la recherche mobilise toutes les énergies. C’est une erreur classique.
SWOT pour les projets
Un
s’avère aussi particulièrement pertinent pour préparer un projet transverse. C’est un excellent outil, non seulement pour dénicher des opportunités mais aussi pour initier
l’incontournable analyse des risques
.
D’autre part les projets transverses souffrent d’un manque chronique de communication. C’est une cause d’échecs pour les projets complexes de ce type. Les inévitables cloisonnements ne sont pas aisés à traverser.
Ceux qui ont bien compris l’importance d’adopter une démarche coopérative pour réaliser cette étude audit, font intervenir une majorité de parties-prenantes. Ils entament ainsi l’indispensable décloisonnement des esprits, si ce n’est celui des structures.
Voir aussi la
pour identifier les stratégies de croissance les plus opportunes selon le contexte bien spécifique de chaque entreprise.
Comment faire une Analyse SWOT
Cette démarche est particulièrement adaptée pour réaliser des analyses SWOT sans perdre de temps. C’est une bonne démarche pour ne pas tergiverser trop longtemps avant d’identifier les bonnes solutions.
Elle est aussi utile pour préparer le déroulement d’un projet transversal. L’impact positif est alors triple :
- 1) On prévient plus aisément les difficultés et on affine donc l’analyse de risques.
- 2) On trouve des solutions inédites.
- 3) Le décloisonnement a déjà commencé.
Un démarche en sept temps
Détaillons chacune des étapes pour conduire une analyse pertinente et productive.
1er temps : Une enquête de terrain
Mobilisez largement et invitez un maximum d’acteurs de l’entreprise à participer à l’étude. L’analyse SWOT, notamment dans cette phase d’audit actif, n’est pas réservée à une élite de l’entreprise. Bien au contraire.
Toute organisation commerciale est complexe par essence, et les informations ne sont pas centralisées. Autant exploiter au maximum les intelligences cumulées pour profiter de la somme des connaissances de terrain.
2ème temps : La préparation
Chaque participant à l’étude se voit remettre un pré-modèle de l’analyse SWOT où sont listées les informations connues et généralement admises. Chacun prend le temps de commenter et de réfléchir aux forces, faiblesses, menaces et opportunités telles qu’il les perçoit de son poste d’observation. Il confronte ses idées avec ses collègues de travail.
La simplicité de l’outil n’est qu’une apparence. Une étude trop rapidement menée en comité restreint et à huis clos risque de masquer sensiblement la réalité. Les décideurs sont alors fortement incités à opter sans avoir pris le soin suffisant de développer et d’évaluer les alternatives.
3ème temps : Établir les règles de la confrontation d’idées
Comme pour toute rencontre efficace, d’entrée de jeu l’animateur précise les règles. Tous les participants sont nécessairement au courant des enjeux. Sans se lancer nécessairement dans un
, on en respectera les lois fondamentales :
- Chacun a le droit de s’exprimer.
- Toute idée proposée est par principe une bonne idée tant qu’elle n’a pas été dépassée par une idée plus fédérative.
- Les responsabilités ne sont pas encore fixées, il n’y a donc aucun risque de s’engager et à proposer une idée. (d’expérience, cette règle est peut-être la plus délicate à faire admettre).
Voyons maintenant le déroulement proprement dit de l’audit actif et les principales conclusions.
4ème temps : On identifie les forces
On utilisera un
diagramme d’affinité (Diagramme KJ
) pour rapprocher et organiser les apports de chaque participant par similarité. Chacun peut argumenter pour défendre sa suggestion si nécessaire.
C’est pour cela qu’il est indispensable d’inciter les participants à bien soigner la phase de préparation pour construire sa batterie d’arguments. Quelques exemples de forces : qualité du personnel, politique de prix, présence sur le terrain, optimisation des processus.
5ème temps : Puis les faiblesses
C’est une opération un peu plus délicate. Il est toujours difficile d’écarter les jugements de valeurs pour laisser s’exprimer une vision plus rationnelle. C’est là où la confrontation de points de vue différents, émis par des acteurs peu accoutumés à se rencontrer, révèle toute sa pertinence.
Une rétrospective de l’année écoulée est un bon support pour identifier les points de blocage qui ont empêcher une croissance plus significative. Quelques exemples de faiblesses : manque de personnel, faible qualification, clientèle volage, obsolescence des produits phares, processus archaïques…
6ème temps : Enfin les menaces et les opportunités
C’est à ce stade que l’on apprend à faire la différence entre les pessimistes et les optimistes. Ce qui peut sembler une menace pour les premiers sera une source d’opportunité pour les seconds, dans la mesure où ces derniers ne se laissent pas aller à la rêverie par manque de pragmatisme. Bref, ce n’est pas si simple, et il faudra se mettre d’accord pour ranger les suggestions dans la bonne rubrique de la matrice SWOT.
7ème temps : On précise les priorités
On classe les résultats de chacune des quatre rubriques par degré d’importance et d’urgence. Pour chaque liste, on met en évidence le "Top 3" de préférence ou le "Top 5" si l’étude est à large périmètre. Cet arbitrage est nécessairement un travail d’équipe. Il doit être fédérateur, le fruit d’un consensus actif.
La synthèse
Au terme de cet audit actif, il s’agit d’identifier :
- Les forces les "plus" solides sur lesquelles s’appuyer pour aller de l’avant (et saisir les opportunités)
- Les faiblesses les "plus" handicapantes à régler sans tarder (pour se protéger des menaces)
- Les menaces les "plus" dangereuses à prévenir
- Les opportunités les "plus" judicieuses à saisir
Remarque :
Un audit stratégique SWOT sera réussi si on parvient à définir de manière univoque pour l’ensemble des participants le sens et la portée de l’adverbe
"plus"
.
Un dernier conseil : Une étude personnalisée
Chaque organisation est spécifique. Il y a tout intérêt à trouver son originalité dans ses structures afin de bâtir les orientations stratégiques qui feront la différence. Il ne s’agit pas de repomper des analyses SWOT déjà existantes, réalisées par d’autres entreprises, même (et surtout!) s’il s’agit d’un secteur d’activité similaire.
À ce sujet, voir aussi
À propos de Michael Porter
Pour concevoir le fameux
, Michael Porter trouve son inspiration dans l’analyse SWOT. Il pense ainsi synthétiser la conception d’une stratégie gagnante fondée sur l’avantage concurrentiel en mettant en évidence les rapports de pouvoir entre les parties.
Cette démarche particulièrement simple à comprendre a été vite adoptée par la plupart des Business Schools… Ce qui n’a pas empêché la faillite du cabinet Monitor Group, fondé justement par Michael Porter et une poignée de professeurs émérites.
Comme quoi, la réalité stratégique des entreprises est un poil plus complexe que ces sympathiques schémas simplificateurs.
Ouvrages de référence
Construire, déployer et mettre en action une stratégie opérationnelle et collective :
Auteur : Alain Fernandez
Éditeur : Eyrolles
L’ouvrage de référence auprès des managers, consultants, chefs de projets décisionnels, formateurs et enseignants :
Les nouveaux tableaux de bord des managers
Le projet Business Intelligence en totalité
Alain Fernandez Eyrolles 6ème édition
495 pages
Dispo :
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La référence la plus complète en matière de stratégie d’entreprise. Cet ouvrage best-seller de sa catégorie est agréable à lire. De nombreux exemples de stratégies en pratique :
Stratégique + Quiz
G. Johnson, R. Whittington, K. Scholes, D. Angwin, P. Regner
Pearson Education 11ème édition Juin 2017
661 pages
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